Partageux rencontre des personnes cabossées par notre société libérale, change leur identité et ne mentionne ni son nom, ni sa ville pour qu'on ne puisse les reconnaître. « Devant la servitude du travail à la chaîne ou la misère des bidonvilles, sans parler de la torture ou de la violence et des camps de concentration, le "c'est ainsi" que l'on peut prononcer avec Hegel devant les montagnes revêt la valeur d'une complicité criminelle. » (Pierre Bourdieu) La suite ici.

mardi 30 septembre 2014

« L'écologie, ça commence à bien faire ! » (Bis)


Sur les méfaits de l’industrie chimique Fabrice Nicolino vient de publier Un empoisonnement universel. Lecture vivement recommandée. Cette contribution partageuse au thème de la chimie envahissante, histoire d’insister sur la dimension universelle du livre de Nicolino, cite des extraits d’Agafia, ermite dans la taïga, de Vassili Peskov, Babel / Actes Sud. Et, histoire d’insister sur la dimension historique du livre de Nicolino, mentionnons que ce texte de Peskov, journaliste, a été publié pour la première fois à Moscou en septembre 1996.

«  Je me souviens d’avoir entendu parler d’un combustible appelé heptyle lors de mes reportages au cosmodrome. Le lieutenant Sambros en remplissait les réservoirs des lanceurs sur le pas de tir, « un liquide spécial qui pue la viande pourrie. » « Nous savions que l’heptyle était un une substance toxique. Très toxique. Le cycle de l’approvisionnement se faisait en vas clos. […] Et maintenant le sort a voulu que je recherche des traces d’heptyle en ces lieux bénis des dieux… » […]

Baïkonour. Centre russe de lancement de cacahuètes spatiales. Travail à façon pour clientèle internationale. Beaucoup de satellites américains.

«  Des traces ? Mais quelles sortes de traces ? Le problème est que le combustible ne brûle jamais complètement et qu’il revient sur terre avec son « fer blanc ». Le premier étage s’écrase non loin du pas de tir, ce qui limite l’étendue de la contamination. Le deuxième, lui, est expulsé à cent orante-huit kilomètres d’altitude. Les restes d’heptyle se consument avec l’ensemble de la structure au contact des cohues denses de l’atmosphère, mais une partie se dissémine à très haute altitude et retombe à terre. En théorie, cette substance synthétique à base d’azote ne devrait pas toucher le sol, comme il en va du combustible des autres autres lanceurs. Et pourtant… des études de terrain réalisées par des experts de différents laboratoires dans les zones d’impact ont révélé des traces d’heptyle dans le sol, la neige, les végétaux. »  […] 

On est dans la taïga, la forêt sibérienne, au cœur des montagnes de Khakasie, au voisinage du massif de l’Altaï. Très loin de Baïkonour. Le village le plus proche est à quelques trois cents kilomètres. On arrive ici en canoë, rivière de niveau 6 c’est à dire des rapides pour rameur chevronné s’en fout la mort. Ou bien à pied, compter une dizaine de jour de marche en l’absence de sentiers. Prévoir ta popote et de quoi effaroucher les ours taquins quand tu dors. Ou bien en hélicoptère si le ciel est dégagé.

«  Les chasseurs s’en plaignent : « Il y a moins de gibier dans le pays, l’Abakan n’est plus torrent poissonneux qu’il était. » D’étranges maladies se sont déclarées dans le massif de l’Altaï : la naissance de «  bébés jaunes » à grande échelle, sans parler d’autres pathologies à ce jour inexpliquées. » […]

Quand on te dit que la chimie s'insinue absolument partout et ne connaît pas la moindre limite ou frontière

«  Question légitime : par quelle perversion une substance hautement toxique a-t-elle pu entrer dans la constitution d’un combustible de fusée ? La réponse est simple. Toutes les fusées à vocation civile sont des clones des missiles militaires pour lesquels l’heptyle présente les meilleures performances. Ces missiles n’ont pas été tirés : qu’on s’en réjouisse ! L’eussent-il été que dans la fournaise universelle les traces d’heptyle auraient constitué le cadet de nos soucis… En attendant, les fusées décollent assez souvent, et le poison est bien là. Quand on sait qu’il ne se dégrade pas dans la nature, qu’il peut d’accumuler dans la chaîne alimentaire d’un bout à l’autre, on comprend tout l’enjeu d’un examen serré du phénomène. »  

Tu sais maintenant pourquoi Agafia, ermite dans la taïga, voit débarquer des chercheurs.

«  À chaque lancement, ce groupe d’experts se rend sur les lieux de l’impact prévu du deuxième étage pour précéder à des prélèvements de sol, d’eau et de végétaux. Avant et après le tir. La prochaine Proton doit s’envoler dans la nuit avec à son bord le satellite américain INMARSAT. Deux groupes feront les observations et le prélèvements sur deux sites différents. Agafia elle-même, son milieu de vie, ses animaux, tout cela présente un intérêt particulier pour les chercheurs. Il n’y a rien ici — alcool ou effluents industriels — qui soit de nature à fausser le tableau… » 
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Photo glanée sur Cailloux dans l' brouill’art «  Le charme », chanson de et par Hervé Suhubiette, filmée par Éric Nadot Tranches de scène, association de promotion de la chanson francophone.

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